• Jean Jouzel : « Agir, maintenant, contre le réchauffement climatique ! »

     

    Il n’y avait plus un strapontin de libre dans la grande et belle salle de l’Espace Octave Mirbeau de Rémalard lorsque, samedi 11 novembre, le climatologue Jean Jouzel a démarré sa conférence sur le thème : « Climat : il est urgent d’agir ».  La notoriété du conférencier invité par PAE (voir ICI) était certes pour quelque chose dans cette affluence, mais pas seulement, ainsi qu’en témoigne la grande attention du public et les questions très pertinentes posées lors du débat.

    Le sujet interpelle, concerne et inquiète, justifiant largement le déplacement en cette soirée froide et humide pour écouter l’un des scientifiques français les plus proche du dossier, et les plus qualifié pour en parler. Et le moins qu’on puisse dire, c’est que les nouvelles du front climatique ne sont pas très bonnes…

     


     La vidéo de la conférence de Jean Jouzel

     


     Etat des lieux : mauvais !

    Jean Jouzel a démarré sa conférence par le rappel de quelques données fondamentales, démontrant sans aucune équivoque la réalité du réchauffement climatique et la responsabilité humaine. Il a ainsi présenté des graphiques qui, depuis 1900, donnent les mesures alarmantes de l’augmentation de température des océans, de la fonte de la banquise arctique et de l’élévation du niveau de la mer. Les trente dernières années furent les plus chaudes depuis l’apparition de la météorologie !

    Jean Jouzel : « Agir, maintenant, contre le réchauffement climatique ! »

     

    Jean Jouzel : « Agir, maintenant, contre le réchauffement climatique ! »

    Jean Jouzel plongé dans sa démonstration, devant un public nombreux et attentif

     

    Les responsables, tout le monde les connait : ce sont les gaz à effet de serre, ces véritables pièges à chaleur qui étouffent petit à petit la planète. En 2013, 75% d’entre eux provenaient du CO2 (gaz carbonique) essentiellement produit par les combustibles fossiles, et 14% du méthane exhalé, entre autres, par les décharges, les rizières et les ruminants. Et 95% de ces gaz sont produits par… nous.

    Le scénario catastrophe : 50°C à Strasbourg en 2050 !

    Une fois ces préliminaires posés, Jean Jouzel est entré dans le vif du sujet en nous présentant deux scénarios possibles. Le premier, le pire, est un authentique cauchemar : si la situation perdure, si rien n’est fait, la température à la surface du globe augmentera entre 4° et 5° d’ici la fin du siècle. Enoncé ainsi cela ne semble pas énorme, sauf qu’à l’échelle du système Terre c’est tout simplement cataclysmique. Le Groenland fondra en élevant de 7 mètres le niveau de la mer – de quoi rayer de la carte quantités d’îles et de zones littorales – les océans deviendront des pièges mortels pour le corail et les espèces qui ne tolèrent pas les eaux acides, les épisodes climatiques violents, extrêmes – inondations, tempêtes, sécheresse – se succéderont dans interruption, de nombreuses espèces végétales et animales seront rayées de la carte faute de pouvoir s’adapter ou émigrer vers des régions plus clémentes, les rendements de blé, de mais ou de riz subiront une baisse drastique, due entre autre à la sécheresse qui va sévir dans une bonne partie de la planète. En France, a rappelé Jean Jouzel, nous perdons déjà six jours d’enneigement par décennie. Les vendanges ont lieu de plus en plus tôt, en septembre au lieu d’octobre dans les années 70. Si le scénario du pire se confirme, à dater de 2050, les températures pourront dépasser les 50°C dans le nord et l’est du pays, une canicule presque insoutenable au regard de celles, à 40°C, que nous vivons si difficilement.

     

    Jean Jouzel : « Agir, maintenant, contre le réchauffement climatique ! »

     

    Certes, ainsi que le reconnaît Jean Jouzel avec ironie, il subsistera les zones, des îlots « décents » en matière climatique, en particulier du coté des pays nordiques, où il fera encore bon vivre et où les plus nantis pourront s’exiler. Mais il y a fort à parier que leur soulagement sera de courte durée : l’une des plus terribles conséquences de ce scénario sera d’obliger des millions, des centaines de millions d’humains à quitter des terres désormais stériles, asséchées, pour chercher refuge dans les régions encore viables.

    Mais tout n'est pas perdu : le bon scénario... si nous agissons vite !

    Il existe, néanmoins, une alternative à ce scénario digne d’un film d’horreur : contenir le réchauffement de manière à ce que l’augmentation de température ne dépasse pas 2°C à la fin du siècle. La planète sera certes bouleversée, bousculée, mais pas au point que nous ne puissions pas nous adapter à ces changements (ce qui ne sera pas valable pas pour tout le monde, hélas…). Cet avenir se prépare maintenant, tout de suite. Primo, pour que l’objectif « pas plus de 2°C » soit jouable, il est impératif que le pic maximum d’émission de carbone ait lieu en 2020. Secundo, la quantité de CO2 que nous produisons devra être divisée par 3 jusqu’en 2050, ce qui implique une limitation drastique de l’exploitation et de l’usage des ressources en énergie fossile. Tertio, nous devons coute que coute maintenir ensuite une parfaite neutralité carbone (autant de CO2 produit que de CO2 éliminé). La bataille va être rude, très rude même compte tenu du nombre d’oreilles qu’il faut encore tirer pour les convaincre de la catastrophe imminente – celles de Trump notamment et de la finance.

    Monsieur Jouzel, mais qu’est ce qu’on peut faire ?

    Le climatologue a eu l’occasion de préciser la nature de ce véritable plan de redressement climatique au cours du débat qui a suivi sa conférence et qui, rappelons-le, a été de très bonne tenue, avec des questions pertinentes (à la grande satisfaction du climatologue, qui nous a avoué en privé être assez las des amateurs de théories du complot climatique…). Il a ainsi pu parler en détail d’une conséquence méconnue du réchauffement : la fonte du permafrost, ces sols perpétuellement gelés dans les régions glacées comme la Sibérie, qui contribuerait à 10% du réchauffement par la libération de gaz à effet de serre comme le méthane.

    Il a aussi répondu à ceux qui, économie d’énergie obligent, s’inquiétaient d’un retour aux siècles anciens. Ce n’était absolument pas son propos, il n’est pas question de revenir à la chandelle mais il est inutile de compter sur un quelconque « miracle scientifique ». Aucune technologie « magique » viendra balayer d’un coup de génie tout le CO2 indésirable, la seule solution est de couper le robinet à pétrole et d’investir massivement, et très rapidement dans les énergies renouvelables. Malheureusement, le retard prit en France est considérable : il faudrait ainsi équiper le pays de 20 000 éoliennes pour atteindre l’objectif de 23% d’énergie renouvelable en 2020 ! Dans un ouvrage à quatre mains à paraitre chez Odile Jacob fin novembre, Jean Jouzel et Pierre Larrouturou, économiste et homme politique à la fibre très verte, ont chiffré cet investissement à mille milliards, la part de la France s’élevant à 45 milliards.

    Jean Jouzel : « Agir, maintenant, contre le réchauffement climatique ! »

    D’autres leviers d’action sont aussi possible, plus à notre portée de citoyens, telle la conversion de l’agriculture vers des pratiques bien plus respectueuses des sols : ces derniers, lorsqu’ils sont bien entretenus, sont en effet de vrais pièges à CO2. Et sans retourner à l’époque de arrières-grands parents, rien ne nous empêche de contribuer à l’effort de ce qui est une véritable guerre en tendant vers une vie plus frugale en énergie, isoler nos maisons, éviter de prendre la voiture pour faire 500 mètres, et ne pas exiger de pouvoir se promener tout nu chez soi en plein hiver : ce n’est pas ça, le progrès !



    La vidéo du débat

     

      


     Et un grand merci à tous !

    La convivialité n’étant pas un vain mot chez PAE, la rencontre a été suivie d’un pot où tout le monde a pu échanger en se régalant du cidre et des jus de fruits de la Reinette Verte, des délicieuses bouchées de Fantine et des en-cas salés/sucrés préparés par nos bénévoles cordons bleus.

    Jean Jouzel : « Agir, maintenant, contre le réchauffement climatique ! »

    PAE remercie chaleureusement la Mairie de Remalard et la commission culture pour la mise à disposition gracieuse de ce bel espace Octave Mirbeau, ainsi que l'équipe qui gère la salle pour sa disponibilité et sa compétence. Nous adressons aussi nos remerciements à tous les bénévoles de l’association qui ont donné de leur temps pour la réussite de cette belle soirée.

     

     

    A lire : Ceux qui désirent aller plus loin et approfondir leur culture autour du réchauffement climatique, une bibliographie est disponible ICI.

     

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